Le vêtement est, au Moyen Âge comme aujourd'hui, à la fois un objet fonctionnel et un objet de parure qui renseigne sur celui qui le porte. Entre la fin de l'Antiquité et les débuts de l'époque moderne, l'art de se vêtir connaît de nombreuses transformations et réinvente souvent sa manière de mettre en valeur le corps et le tissu.
Au début du Moyen Âge, le vêtement, qui est principalement fait de lin ou de laine, reste très attaché aux formes antiques.
La soie est un produit de luxe, réservé aux milieux de cour. Le vêtement masculin comprend souvent une tunique en forme de T et un manteau, simple étoffe rectangulaire, drapée en biais sur le corps. La longueur de la tunique est fonction du statut social : courte pour les militaires ou les travailleurs des champs, plus longue pour les prêtres ou les grands personnages. Les femmes revêtent plusieurs tuniques superposées. La fourrure, employée en doublure, contribue au confort thermique.
Les vêtements portés par les prêtres pendant les célébrations liturgiques sont institués dès l'époque carolingienne. Le vêtement impérial est particulièrement codifié dans l'empire byzantin. L'ivoire d'Otton II et de Théophano (Cl. 392) montre ainsi l'empereur drapé de la chlamyde et chaussé des traditionnelles bottines qui étaient rouges. Dans les représentations bibliques, le costume continue jusqu'à la fin du Moyen Âge à s'inspirer des vêtements antiques, toge et palliums romains, comme on le voit sur la plaque d'ivoire aux douze tribus d'Israël (Cl. 23892).
Aux 11e-12e siècles, l'importance des échanges commerciaux accroît la variété des matériaux disponibles : soies orientales, lin, laines produites dans toute l’Europe, fourrures des régions septentrionales. Les métiers du vêtement prennent leur essor, l'iconographie témoigne déjà d'effets de mode... Il est d'usage de superposer une chemise de toile, la chainse, et une tunique de dessus, le bliaud, souvent pourvu de manches très évasées. Le bliaud pouvait être ourlé de galons brodés : c'est ce que l’on observe sur le vitrail de saint Timothée (Cl. 13335). La silhouette peut s’envelopper d’un manteau porté sur le bliaud.
Les femmes portent leurs cheveux le plus souvent tressés, de deux manières différentes, "en trecié" ou alors "galonnés", lorsque les mèches de cheveux sont entrelacées avec un ruban de soie, comme sur la tête de la reine de Saba (Cl. 23250).
Dans le Roman de la Rose, Guillaume de Lorris recommande au gentilhomme qui souhaite gagner le cœur de sa Rose de se vêtir avec élégance, de faire appel à un tailleur compétent, capable notamment de confectionner les manches. Les vêtements masculins et féminins ne sont alors pas vraiment différenciés. Hommes et femmes portent la cotte de drap à encolure ronde et manches ajustées, celle de l’homme étant un peu plus longue. Ce vêtement peut être ceinturé aux hanches et blouser au-dessus de la ceinture de cuir ou d’étoffe. L’homme porte souvent le chaperon, qui couvre ses épaules et parfois sa tête, comme on le voit sur le coffret de l’Assaut du château d’amour (Cl. 23840). Au-dessus de la cotte, on peut passer le surcot : une tunique, en règle générale dépourvue de manches avec de larges ouvertures sur les côtés, visible sur une enluminure du Code Justinien (Cl. 22717 b).
Durant le 13e siècle et la première moitié du 14e siècle, le nombre de pièces de vêtement qui composent la garde-robe augmente, les coupes sont plus habiles et un soin plus important est apporté aux détails. La draperie de laine se transforme, avec l’apparition du fil cardé, filé à la roue, permettant d’utiliser les laines courtes et de créer des tissus robustes et meilleur marché, par opposition aux draps de laine peignée, jusqu’alors obtenus à partir de laines longues. Les boutonnages apparaissent, comme sur la fente délicatement boutonnée de la cotte de Pierre d’Alençon (Cl. 23408). L’attrait pour l’ornement se retrouve aussi dans la broderie qui enrichit cols, galons et orfrois : on le remarque aux poignets de la comtesse sur l’orfroi de Manassès et Ermengarde (Cl. 2158).
Les coiffures sont faites d’étoffes, les femmes mariées portent la guimpe qui passe sous le menton (masque de gisant de Jeanne de Toulouse, Cl. 22863) ou le touret (tympan de Notre-Dame de Paris, Cl. 18643d). Les ceintures peuvent être ponctuées de décors métalliques à l’exemple de la ceinture du trésor de Colmar (Cl. 20674), et des éléments de parure comme les émaux de plique (Cl. 21386, Cl. 21387 et Cl. 23411, a, b, c, d) sont cousus sur les vêtements (gants, décor d’encolures) les plus luxueux. De plus en plus d’artisans travaillent dans la confection de vêtements, le Livre des métiers d’Etienne Boileau recense environ vingt commerces de ce type à Paris en 1260.
La fin du 13e siècle est marquée par l’édiction des lois somptuaires en Europe et notamment en France, afin de limiter voire interdire le port de matières trop précieuses telles que la fourrure ou la soie.
Le 14e siècle correspond à une période de rupture dans l’histoire du vêtement : le costume des deux sexes se différencie définitivement. Cependant, certains éléments, comme les aumônières, (Cl. 11787, Cl. 11788), étaient portés par les hommes et par les femmes.
Les marchands italiens, établis notamment dans des villes comme Florence ou Lucques, fournissent les élites en draps de laine aux couleurs raffinées, ou en étoffes de soie façonnée. La chasuble du donateur aux pieds de la Crucifixion du Bréviaire de Gérard de Montaigu (Cl. 11316) est un témoignage figuré de ces tissus de soie à motifs brochés. Le bas pontifical, dit d’Arnaud de Via (Cl. 8604), est taillé dans un lampas de soie et fils d’or, à décor d’oiseaux fantastiques et de gazelles.
Les différences régionales tendent à s’accentuer, mais se conjuguent aussi au gré des influences mutuelles qui s’exercent par le biais des unions entre les grandes familles. Ainsi, lorsque Valentine Visconti, fille du duc de Milan, épouse le frère du roi Charles VI en 1386, elle apporte en France tissus et vêtements de la mode lombarde.
Dès le milieu du 14e siècle, le costume masculin se raccourcit et devient beaucoup plus ajusté, pour mettre en valeur la carrure. Le pourpoint et la jaque remplacent la cotte. Le jouvenceau de la cheminée du Mans (Cl. 19093) arbore ainsi un pourpoint sur des chausses qui épousent la forme de ses jambes et se terminent par les fameuses poulaines, souliers très pointus qui allongent la silhouette.
Les femmes revêtent toujours la cotte et le surcot. Ce dernier est souvent enrichi de parements de fourrure, écureuil, martre ou hermine. La coupe évolue : le surcot devient un vêtement d’apparat que l’on ne porte que pour les grandes occasions et les dames adoptent la cotte hardie qui présente un décolleté plus profond et dévoile parfois jusqu’à la naissance des épaules. Très ajustée, elle se boutonne souvent par-devant et parfois également sur le côté. Les manches peuvent être très longues et former des coudières à partir de l’avant-bras, comme sur la cheminée du Mans (Cl. 19093).
La houppelande, robe de dessus portée par l’homme comme par la femme, avec ou sans ceinture, apparaît autour de 1400. Elle est éventuellement fourrée. Les manches qui s’évasent dévoilent les poignets ajustés de la chemise sous-jacente. Courte ou longue, la houppelande peut être taillée dans des tissus précieux et se faire manteau d’apparat. Pour l’homme, elle se raccourcit à mi-mollets et se ceinture bas sur les hanches : c’est ainsi qu’est vêtu le jeune homme de la valve de miroir au couple d’amoureux (OA 115), ou les joueurs d’échecs du vitrail de Villefranche-sur-Saône (Cl. 23422).
Parallèlement, le vêtement civil s’adapte aux saisons et aux activités. On peut voir, sur les calendriers des livres d’heures, des individus qui s’adonnent aux activités domestiques, vêtus plus ou moins chaudement comme sur l’exemplaire du Maître d’Egerton (feuillets d’un livre d’heures, Cl. 11314 a à l).
A la fin du Moyen Âge, les cours princières européennes déploient un luxe et un raffinement de la mise inouïs. Les vêtements sont taillés dans des étoffes de plus en plus précieuses. La technique du velours allucciolato, mise au point en Italie vers 1430, ajoute à l’armure des velours de petites boucles de métal doré.
Le costume masculin reste fidèle à un pourpoint qui tend à s’amplifier davantage et au-dessus duquel on porte la saie, un vaste manteau qui s’ouvre par-devant et présente de très larges manches fourrées ; ce costume est celui du jeune chasseur de la tapisserie Le Départ pour la chasse (Cl. 2183). Il porte par ailleurs des chaussures en mufle de bœuf (évasées au bout du pied), et un chapeau à rebords, assez plat.
La coiffure évolue rapidement au 15e siècle : les premières décennies sont marquées, pour les femmes, par des coiffes à cornes qui scandalisent les moralistes : les cheveux sont retenus par une résille sur laquelle est posé un bourrelet. Ces coiffes peuvent être enrichies de pierreries et drapées dans de la mousseline, comme sur le portrait de la famille Jouvenel des Ursins (RF 9618). Cette mode culmine avec le hennin, qui voit le jour en Bourgogne et adopte diverses formes aux 14e et 15e siècles. On le reconnaît sur le vitrail du jeu d’échecs de Villefranche-sur-Saône (Cl. 23422) ou la sculpture de la Donatrice en prière (Cl. 19271). Cependant, ces coiffes hautes passent de mode dès le troisième quart du XVe siècle et les femmes leur préfèrent le chaperon à queue pendante que l’on observe à plusieurs reprises dans la tenture de la Vie seigneuriale (Le Bain, Cl. 2180) ou un petit voile de velours, représenté dans la tapisserie des Vendanges (Cl. 21541). Les parures de tête raffinées que portent la dame et sa suivante sur la tenture de la Dame à la licorne (Cl. 10831 à Cl. 10836) montrent que l’inventivité reste de mise.
Les vêtements représentés dans la tenture de la Dame à la licorne (Cl. 10831 à Cl. 10836) témoignent également du raffinement des étoffes disponibles en France au tournant des années 1500 : le surcot de la Dame, dans l’Ouïe (Cl. 10833) est coupé dans un velours alluciolato, avec un motif à la grenade. Les robes sont taillées dans des brocarts à grands motifs ou dans des velours et doublées de moire. Elles sont ornées de bijoux, de ceintures orfévrées, comme le demi-ceint aux grenades de la Dame du Goût (Cl. 10831) ou d’un revers en hermine, dans la pièce du Toucher (Cl. 10835). La robe lacée, portée par la Dame du Goût, prend le nom de corset et supplante peu à peu la cotte hardie, notamment en France ; elle annonce les robes aux bustiers étroits de la Renaissance.